Le peintre Marcel François Leprin


Qui était Marcel Leprin ?


Marcel Leprin naît à Cannes en 1891. Le début de sa vie est difficile et
malheureux, car le jeune Marcel est orphelin. Il ne connaît pas ses parents, et doit se débrouiller seul pour subsister à ses besoins. Pour cela, il se rend à Marseille, où il mène la vie de bohême.
Pour gagner un peu d’argent, il peint sur le Vieux-Port. C’est à partir de ce moment qu’il commence sa carrière d’artiste peintre. Pour l’aider, Marcel va être recueilli par les Pères salésiens de Don Bosco, une congrégation religieuse qui a pour but de donner une éducation à la jeunesse, via des écoles professionnelles et des maisons sociales. C’est exactement ce dont le jeune Marcel a besoin. Les pères salésiens ne tardent pas à remarquer le talent naissant de l’artiste qui a commencé à s’exercer sur le Vieux-Port de la cité phocéenne. Les membres de la communauté encouragent Leprin dans son talent, et l’initient au dessin et à la lithographie.
Se sentant d’abord appelé par des contrées ensoleillées, Leprin se lance à 22
ans dans la corrida à Barcelone. Il intègre une petite troupe de tauromachie,
qui se met en scène dans des parodies de corridas, et anime les places des
petits villages environnants le dimanche. Le peintre s’inspire de son vécu et de cette passion, il réalise des œuvres très colorées illustrant des toréadors.
A la même époque, il rencontre Hélène, dont il tombe amoureux et avec qui il se marie. Hélène était sa muse et son idéal féminin.
Mais la Première Guerre mondiale commence, et Leprin part à bord du navire Waldeck-Rousseau, en tant que fusilier marin. Leprin a 23 ans et va connaître les horreurs de la Grande guerre. Sa peine n’en est que plus grande lorsqu’il rentre de la guerre en 1919 : Hélène a disparu, elle est partie quelques jours plus tôt avec un souteneur. Leprin ne revoit jamais la femme dont il était épris.
Cette rupture est vécue par l’artiste comme un deuxième abandon, et le plonge dans une grande détresse affective et émotionnelle. Pourtant, Leprin reste à Marseille les deux années suivantes, la ville qui l’avait adoptée. Il peint à nouveau des scènes de tauromachie. Il est recueilli par une famille de commerçants, mais malgré cette aide précieuse, Leprin mène une vie dissolue qui le conduit dans les quartiers défavorisés de la ville. Sa santé en pâtit, il est temps pour Marcel de changer d’air.

Les débuts de Marcel Leprin à Montmartre


Marcel Leprin pose ses maigres bagages à Montmartre en 1921, et s’installe au 22 rue Lamarck. Le peintre a 30 ans.
À cette époque-là, la vie est rude à Montmartre. L’appétit des promoteurs immobiliers n’est pas encore à son apogée, et l’avenue Junot, si emblématique du quartier de la butte, est surnommée « le maquis de Montmartre ». La pauvreté et la précarité sont le quotidien des habitants du quartier. Marcel Leprin va alors embrasser ce quotidien. Il a vécu une vie difficile dans le sud de la France, et la réalité parfois triste de la vie montmartroise ne lui fait pas peur. Au contraire, tout ce qui l’entoure va devenir une source d’inspiration. Il connaît la misère, et il va se faire témoin de la vie à Montmartre à cette époque.
D’autre part, les commerçants de la butte Montmartre sont tout à fait conscients de la pauvreté des artistes qui résident le quartier et sont solidaires. Tout comme Francisque Poulbot a aidé les enfants de la butte, les restaurateurs ne sont pas regardants avec leurs clients artistes, bien souvent mauvais payeurs. Marcel Leprin va souvent trouver refuge dans un restaurant de la Place du Tertre, « La mère Catherine ». Ce restaurant était l’ancien presbytère du curé de l’église Saint-Pierre de Montmartre. Faut-il y voir un lien avec les pères salésiens qui avaient recueilli Marcel lorsqu’il était enfant ? En tout cas, le peintre peut compter sur sa bonne étoile et sur la générosité de la patronne du restaurant, qui le nourrit avec des repas chauds, dans une salle à l’abri du froid, en échange d’une toile. La restauratrice aime le style du peintre, qui peint sans détours des paysages de Montmartre authentiques, dans toute leur réalité.
Le peintre se lie avec les artistes montmartrois de l’époque, comme Suzanne Valadon (dont il peint le portrait avec son chat), son fils Maurice Utrillo, l’aquarelliste Frank-Will, l’auteur Max Jacob…
En 1922, Leprin expose au Salon d’Automne, qui a lieu au Grand Palais.
Malheureusement, il est à cours d’argent l’année suivante, et doit trouver à
nouveau un moyen de subsister à ses besoins.
La stabilité à Montmartre pour leprin : un travail fixe et la Cité des
Fusains
Fort heureusement, Marcel Leprin rencontre en 1924 un encadreur
montmartrois qui va lui donner du travail : Henri Bureau. L’encadreur va lui
faire confiance et lui proposer un contrat d’exclusivité, tout en l’aidant à favoriser sa carrière. Il va même jusqu’à lui ouvrir les portes de sa maison, et le peintre réside alors chez son employeur, rue de Rochechouart, au début de leur collaboration.
Leprin acquit une stabilité qui va lui permettre de se consacrer pleinement à la peinture, sans se soucier des contraintes matérielles. Marcel Leprin est prolifique, et ne se lasse pas de peindre Montmartre sous toutes ses coutures : du Moulin de la Galette à la place du Tertre, de Saint-Pierre de Montmartre au zinc d’un bistrot pour l’esprit bohême, en passant par le maquis du haut de la butte…
Une des adresses montmartroises de Marcel Leprin a été la Cité des Fusains. Cette cité d’artistes a vu des artistes prestigieux travailler en ses murs, tout comme le Bateau-Lavoir. Pourtant, la Cité des Fusains est aujourd’hui bien plus confidentielle que la célèbre adresse de la Place Emile Goudeau.
Depuis les années 1920, la Cité des Fusains agrandie rue Tourlaque accueille Auguste Renoir, Max Ernst, André Derain, Pierre Bonnard, Joan Miro… Marcel Leprin fait donc partie de ce panthéon des peintres montmartrois qui ont, pour un temps plus ou moins long, élu résidence à la Cité des Fusains. Un certain Salvador Dali a eu la même idée…
Aujourd’hui, la Cité des Fusains est une résidence privée, dont l’accès est (très) strictement gardé par un digicode. Il faut habiter la résidence pour pouvoir y entrer, et avoir la chance de parcourir sa cour secrète ornée de verdure…

Un peintre tourmenté jusqu’à la fin de sa vie


En 1926, Marcel Leprin entreprend un voyage des villes et villages de France, et explore une nouvelle palette de couleurs. Encore une fois, c’est la réalité brute, dans son aspect naturel cette fois-ci, qui va inspirer la production du peintre. Pourtant, Leprin ne peut vaincre son attraction pour le dénuement.
Loin d’être un grand observateur des saisons, ou même de représenter les floraisons colorées du printemps, c’est l’hiver qui emporte sa préférence, dans toute sa roideur et sa mélancolie. Cette tristesse ne le quitte pas. Solitaire et dépressif, Marcel Leprin meurt prématurément à l’âge de 42 ans à l’hôpital Tenon dans le vingtième arrondissement de Paris, rongé par ses excès de drogue et d’alcool. Il reste un peintre emblématique de Montmartre, dont certaines œuvres sont exposées au Musée de Montmartre.


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